samedi 29 septembre 2012

Stickerland

Dans ce pays, le sticker, c'est à dire l'autocollant, est une véritable institution.

Les supermarchés en donnent aux enfants lors du passage en caisse, les visites chez le pédiatre se terminent souvent par un pugilat fraternel pour savoir qui aura Batman et qui Cinderella, la visibilité en voiture est souvent réduite par les mêmes Batman et Cinderella aussitôt collés à tort et à travers sur le premier support venu etc... Sans parler de l'école, premier pourvoyeur de stickers multiples et variés, collés sur le homework (Good job! Star!...) ou plus vicieusement sur les vêtements des enfants (ne jamais mettre au lave-linge un T-shirt avec son sticker dessus, vous perdez les deux, irrémédiablement), voire carrément directement sur le front des bambins. Il faut s'habituer.

Le sticker est aussi très largement utilisé par la population adulte, comme support de convictions et d'autres messages plus ou moins subliminaux. Souvent l'arrière des voitures arbore fièrement ces insignes, comme le corps les tatouages. Etre coincé dans un embouteillage peut donc devenir une expérience assez distrayante. 

Regardez celle-ci, admirablement anti-Bush et/ou bouffe-curé


et celle-ci, pas rare du tout, que l'on pourrait traduire par

"Un futur polytechnicien dans la famille!!"

ou encore par

"C'est bien parti pour une prépa à Henri IV!"


Qu'est-ce qu'on rigole...




mercredi 26 septembre 2012

Expire

Une question me tarabuste: est-ce que tout le monde meurt sur une expiration?

On rend son dernier souffle, on exhale son dernier soupir, on ex-pire...

Bon sang mais est-il donc impossible d'envisager de mourir sur une inspiration?

Pfff... Ca me tue...

lundi 24 septembre 2012

Welcome! emotions

The Guesthouse 

C' est un petit texte très connu de Rumi, poète et philosophe sufi perse du 13ème siècle.
Traduction Coleman Banks

This human being is a guesthouse
Every morning a new arrival:
A joy, a depression, a meanness,
Some momentary awareness comes
as an unexpected visitor.

Welcome and entertain them all!
Even if they're a crowd of sorrows, 
Who violently sweep your house
empty of its furniture,
Still, treat each guest honorable.
He may be clearing out
For some new delight.

The dark thought, the shame, the malice,
Meet at the door laughing,
And invite them in.
Be grateful for whoever comes,
Because each has been sent
as a guide from beyond.

Bad emotions: Invite them in, be with them for a while, but don't serve them diner...



mardi 18 septembre 2012

Invented spelling

Dans la série "set yourself up for success" à l'école, 
la maîtresse de ma fille en 1st grade nous a expliqué lors de la réunion parents-professeur qu'elle n'était pas du genre à épeler les mots aux enfants: ceux-ci sont chargés de faire fonctionner leurs méninges et d'inventer l'orthographe correspondant à ce qu'ils entendent. Cela s'appelle invented spelling.


Voilà ce que ça donne, un cadeau juste comme ça, hier soir, une merveilleuse déclaration d'amour.


A moins que cela ne soit une violente diatribe contre mes chaussures??

lundi 17 septembre 2012

Pay it forward

Il y a une nouvelle tendance dont on parle à droite et à gauche, la gift economy.

Basically, au lieu de vendre, on donne. 
Attention, ce n'est pas du troc: au lieu d'être une relation de réciprocité entre deux personnes, Mr A et Mme B par exemple, comme toute transaction contractuelle impliquant un créditeur et un débiteur, en argent ou en nature, on introduit là un troisième gus, Mr Lucky. 


Mr Lucky marche dans les rues de Berkeley et meuble sa maison avec des trucs et des machins en bon état (on ne se fout pas du monde quand même) qu'il trouve sur le trottoir avec dessus une feuille marquée FREE STUFF.

Mr Lucky passe le Bay Bridge pour aller guincher à San Francisco et au moment où il sort son porte-monnaie pour s'acquitter du prix du péage, 5 dollars, on lui dit "pas la peine monsieur, la voiture d'avant a payé pour vous". Ah??!

Mr Lucky va déjeuner à Karma Kitchen Berkeley, un restaurant indien absolument délicieux dont le modèle économique a essaimé déjà à Chicago et Washington. Là, au moment de payer l'addition, il sait que son repas a déjà été payé par quelqu'un d'autre auparavant (il n'a aucune idée de qui) , lui va se contenter d'offrir un repas à quelqu'un qui viendra plus tard déjeuner ici (il n'a aucune idée de qui et quand). Il peut mettre 5 dollars ou 50 dollars, on s'en contrefiche. 


Au bout d'un moment, Mr Lucky se dit qu'il a envie de jouer aussi, il sort les trucs qui l'embarassent sur le trottoir, il pay forward au péage, il tente un sourire gratos à la voisine qui fait toujours la gueule parce qu'on ne sait jamais elle va peut être du coup en décocher un ou deux dans sa journée, il envisage sérieusement de donner sa voiture quand viendra le moment de s'upgrader, et il écrit même son idée dans un blog public afin d'être moralement obligé de passer à l'action. 


Mr Lucky est devenu un maillon d'une chaine ouverte et infinie de kindness. Au lieu de consommer tout le temps, il contribue aussi de temps en temps. Il trouve cela planant. 





PS 1: j'ai volontairement changé le sexe de Mr Lucky afin de brouiller les pistes.
PS 2: bien réfléchir avant de payer forward aux péages si vous avez des enfants avec vous; ils trouvent cela génial, ce en quoi ils ont raison, et en redemandent tout le temps (ce en quoi ils cherchent à maximiser leur plaisir ce en quoi ils ont encore raison).



Un petit film sur Karma Kitchen, on y voit même ma copine Mariette:)

mardi 11 septembre 2012

Self-compassion versus self-esteem

Une chose est claire: la self-esteem, c'est complètement has been.

L'Amérique s'en est repu suffisamment avant de lentement découvrir les méfaits de la poursuite incessante du 
                              "je me sens bien parce que je suis spécial, et un peu mieux". 

Le problème de la self-esteem, c'est quand les personnes qui la cultivent avec talent se trouvent en situation d'échec, même modeste. Comme la self-esteem requiert à la base une évaluation de sa propre valeur, celle-ci peut chuter en flèche au gré des circonstances. 

Exemple 1: je viens d'être absolument désagréable avec mon mari/ami/fils/boucher/chien/... pour rien, juste parce que cela m'a fait du bien de vider mon sac. Je me sens mal et je vais de ce pas me pourrir ma journée entière. Je vais moins travailler, moins écouter, moins profiter, moins donner... 
Mini chute de la self-esteem sur une journée. Grosses conséquences.

Exemple 2:  Je suis depuis plusieurs mois dans une phase de ma vie bizarroide où je ne sais pas trop quoi faire, où je vais, à quoi je peux être utile, par où commencer. Je ne produis pas. J'ai l'impression que tout le monde le voit. Je n'ai pas grand chose à dire. Chuis nul en fait.
Mmmhhh... assèchement rapide de la self-esteem, spirale négative, grosse fatigue. 
Not good at all.

Un autre problème de la self-esteem, c'est que quand on en a peu, en dépit d'efforts monstrueux et continus, on se sent complètement merdique et inadéquat, on se demande quelle porte on a loupée etc... 


Influencée par le bouddhisme qui place la notion de compassion au centre de sa réflexion, la recherche en psychologie s'est intéressée au concept proche de Self-compassion, une attitude qui se décompose en trois phases

1.   reconnaître/voir qu'on a bobo ou qu'on a du mal avec ceci ou cela 

Combien de fois ce simple constat nous reste-t-il en travers de la gorge? est-ce normal de trouver x difficile, comment ça se fait que je ne progresse toujours pas là-dessus, pourquoi je me sens ramollo aujourd'hui etc... etc...  Accessoirement il peut être utile de constater que très souvent le bobo vient de la satanée et toujours très prompte self-critic que nous trimballons depuis la nuit des temps dans la besace de nos états d'âme. C'est elle qui nous fait mal en fait, pas le fait qu'on a raté...

2.   développer la gentillesse envers soi (kindness)

Aurait-on idée de pourrir un enfant qui apprend à marcher pendant des jours et des jours parce qu'il tombe encore? De critiquer vivement un ami qui a merdé dans sa vie privée et de s'en tenir là, sans lui offrir d'empathie, de compassion, même si dans un deuxième temps? de ne pas rappeler la semaine d'après pour savoir comment ça va? 

3.   se rappeler que tout le monde fait des erreurs

La self compassion développe l'acuité de notre regard sur ce qui est commun à tous, au lieu de chercher à se différencier et à se comparer. J'ai raté, let's face it, watch it, let's forgive myself and move on

La self-compassion a ceci de supérieur à la self-esteem qu'elle permet de trouver une voie plus sustainable d'être en relation avec soi et les autres, moins soumise aux aléas. Elle intervient en force juste là où la self-esteem est réduite à néant: en situation d'échec ou de sentiment d'échec. Elle permet de retrouver pied plus rapidement et de continuer sa route ou sa journée, les yeux grand ouverts pour percevoir toutes les situations d'apprentissage que la vie nous propose.



More on the scientific approach of Self-compassion: Kristin Neff's work and research

jeudi 6 septembre 2012

What do we focus on?

J'adore cette vidéo.

Elle dure moins de deux minutes. Préparez-vous à un Aha moment (j'adore aussi les aha moments)




So, what do we want to count in our days?

What do we want to see in our life?

If we want to see it, we'll see it.

lundi 3 septembre 2012

Learning curve



Voici l'affiche qui trône au centre du tableau blanc de la classe de 1st grade de ma fille ainée (6,5 ans), cette année. 


Que c'est intelligent. Brillant. 


Un chouia contre-intuitif néanmoins, non? 



Je vis une relation complexe avec cet énoncé, pourtant au coeur de la pédagogie élémentaire américaine. 

Depuis mon intervention, il y a deux ans, auprès d'une maîtresse de la preschool au bout de trois mois de retour des feuilles de lettres avec toujours le même N en forme de Z, non corrigé, où elle m'avait ingénument opposé que "no, i won't correct it because this is how your daughter sees the world", depuis ce jour donc, j'ai bien saisi qu'il y avait comme un gap et que visiblement c'était à moi de le franchir. 

Les années passent et nous continuons notre plongée dans le système éducatif local. 
Tout, je dis bien tout, est valuable. Il y a 5 erreurs dans tes deux pages de homework? Qu'importe, good job, sticker. You don't try to be the best you try to do your best. You can do it. Stick to it. Be proud. Awsome.

Ma fille m'aide beaucoup, surtout depuis son année de Kindergarten (l'équivalent d'un CP, à la vraie école), où elle a aquis des réflexes de confiance et de persévérance que je lui envie. Quand on fait un gâteau en suivant pour la première fois une nouvelle recette et qu'il a trop une sale tronche juste avant son passage au four, c'est elle qui me rassure : "Mais maman, c'est la première fois, on essaie, peut-être qu'on va rater et alors? ". La tête sous l'eau à la piscine? Elle va y arriver un jour, oh, eh, il n'y pas le feu au lac non plus, chacun son rythme. Thank you sweetie. You are so right. 

Revenons au 1st grade. A la fin de la première semaine de cours, la maîtresse invite les parents à venir écouter quelques comptines et admirer leur progéniture dans l'environnement qui sera le leur jusqu'au mois de juin prochain. Pour attirer l'attention des enfants et les faire taire, les teachers utilisent souvent des slogans coupés en deux, ils en disent la première partie, les enfants reprennent la seconde en choeur, toute leur attention se mobilise ainsi sur la réponse et juste après ils sont prêts à écouter ce qui va suivre.

Par exemple:
-Go...
-...Bobcats!!! (l'ensemble 3 fois de suite) 
soit Allez les lynx, l'équivalent de la Marseillaise dans l'école de ma fille.

Ou encore, vendredi dernier donc, rien que pour mes oreilles de petite Française élevée au stylo rouge et à l'autocritique:
-Shining...
-...Stars!!! (l'ensemble 3 fois de suite), 
-That's what you are 
conclut l'instit tranquillement, probablement pour l'ensemble des présents.